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La newsletter déco qui spotte les belles choses et bonnes idées. Deux fois par mois, découvertes, marques, adresses, mindsets qui sortent des sentiers battus.

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Par Philippine Sander
19 sept. · 5 mn à lire
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09. Hors série : 9 détails repérés à Maison & Objet

Il n’y a pas de détails. 

C’est ce que me répétait toujours une linguiste avec laquelle je travaillais en agence de communication, à propos du langage. Elle avait conscience que la communication se jouait à un mot près, à une phrase près. Écrire un texte avec elle (elle écrit souvent à quatre mains) c’est comme faire un déménagement. Quand on pense que c’est terminé, il reste encore des phrases à jeter, trier, ranger, et surtout... le bon mot à trouver et à placer.

Petite, elle avait été marquée par un conte qu’elle avait lu.

C’est l’histoire d’un pêcheur qui va lancer un filet pour sauver un marin passé par-dessus bord. Mais le petit moussaillon, qui avait refait des filets neufs, n’avait pas bien consolidé l’une des mailles. Le filet va craquer et le marin que l’on veut repêcher meurt. Le petit moussaillon a cru qu’une maille mal consolidée n’avait pas d’importance, mais il n’a pas su qu’un jour cela jouerait la vie d’un homme…

Pour elle, il n’y a pas de détail car tout est important. Il faut tout faire bien, même ce qui ne se voit pas (très valable quand on rénove une maison… heureusement que Monsieur Lajoie est méticuleux).

Le soin porté à une silhouette, à la décoration d’une maison, à une manière de nous adresser à quelqu’un raconte bien plus de choses qu’on ne le pense. Les détails n’en sont pas.

C’est en me promenant dans les allées de “Maison et Objet” début septembre que cette phrase m’est revenue, comme une fulgurance. 

Alors, comme c’est le neuvième numéro de cette newsletter, go pour les 9 détails repérés à Maison & Objet.

1- Le col roulé des bouillottes colorées de SUITE702

Moi qui ai toujours froid, une bouillotte qui a un minimum de style : my dream.

La marque est née à Amsterdam en 2018. Sa promesse : l'expérience d'une suite d'hôtel 5*, à la maison. Pourquoi SUITE702 ? Un clin d'œil au célèbre Bed-In de John Lennon et Yoko Ono. En 1969, pendant leur lune de miel, ils passèrent une semaine entière au lit dans la suite 702 de l'hôtel Hilton d'Amsterdam. Le Bed-In de John et Yoko était entièrement consacré à la paix mondiale.


Suite702, marque de linge de lit

Les serviettes et le coussin rond étaient pas mal aussi

2- Les abat-jours en plastique recyclé style scoubidous de notre enfance

Vus sur le stand de Ango World, marque thaïlandaise.

3- Des flotteurs en tête de lit

Lors de cette conférence “Mixer le vintage et l’art dans un intérieur contemporain” qui a eue lieu pendant Maison & Objet, Marion Mailaender raconte qu’elle a énormément chiné pour créer l’ambiance du fameux hôtel Tuba Club à Marseille, pour que les clients retrouvent l’esprit cabanon cher à la cité Phocéenne.

Ses trouvailles vont de photos de Jean-Pierre Papin (joueur de l’olympique de Marseille) repérées chez Emmaüs à des appliques faites par le céramiste Fernand Léger. Un grand écart assez récurrent dans son travail. Elle a aussi trouvé des caisses entières de flotteurs abîmés et inutilisés, puis elle en a fait des colliers géants qu’elle a mis en tête de lit (cf photo). Je trouve l’idée géniale. Elle a également recyclé des pots à poulpes, ces pots en terre que l’on met au fond de l’eau pour les pêcher.

La journaliste qui interviewe Marion Mailaender et Rodolphe Parente insiste sur l’humour, omniprésent dans leurs mises en scènes : pour eux, l’important n’est pas de se prendre au sérieux mais de faire les choses sérieusement. Toujours avoir de la distance dans sa pratique. On n’a pas peur de se tromper, on veut même se tromper.” explique Rodolphe Parente. Puis il précise : “J’aime l’accident qui donne de la fraîcheur à un lieu. L’idée du bon goût m’ennuie, le pas de côté donne de la saveur. Ce qui m’ennuie dans les intérieurs beiges / greiges c’est que c’est une photo parfaite, mais c’est une photo d’un catalogue, on ne vit pas dans des pages de catalogue.

Retrouvez la conférence ici.

4- Des carreaux de ciment MaPoésie x pophamdesign transformés en pot de fleurs

Appréciant particulièrement la marque MaPoésie, je suis passée sur leur stand. En plus des beaux textiles que l'on reconnaît à 1000 km, je suis tombée nez à nez avec ces carreaux de ciment popham design sur lesquels se sont retrouvés les motifs MaPoésie. Ils se mettent au mur ou au sol. À garder en tête pour une prochaine salle de bain. Avant de partir, j’ai remarqué que certains carreaux s’étaient transformés en pot de fleurs. Pratique quand il reste du carrelage empilé dans le garage…

MaPoésie x PophamDesign

5- L’effet des luminaires Elements lightning sur les murs

Pas grand chose à rajouter à part que c’est beau et original. Tout le monde s’arrêtait pour regarder.
Elements Lightning

6- La manière dont Gesa Hansen et David Thulstrup parlent de l’importance du jeu d’ombre et de lumière chez les Scandinaves

C’est la grande différence entre le minimalisme allemand et le style nordique : les jeux de lumières.  D’après Gesa Hansen, designer et architecte d’intérieur germano-danoise qui connaît donc bien les deux styles, les pays scandinaves n’ont pas peur des nuances, de l’ombre et des lumières douces, qui créent de l’intimité, explique-t-elle lors de cette conférence dédiée à l’avenir du design danois.

Puis David Thulstrup, architecte d’intérieur danois, confirme : au Danemark, il fait jour de 4h du matin à 23h le soir en juin, et l’hiver, il fait nuit de 15h à 8h du matin. “We are used to light and shadow as a natural rhythm of earth”. À Copenhague, même la lumière publique est tamisée, pour préserver cette sensation d’enveloppement, de douceur. Il se réjouit de l’hiver qui arrive.  La première chose qu’il fait en se levant le matin et en se couchant le soir : allumer ou éteindre une bougie*. “Il y a la lumière artificielle et la lumière naturelle, et notre rôle en tant qu’architecte d’intérieur est de créer un équilibre parfait entre les deux, tout au long de l’année. Je fais très attention à créer des ouvertures dans des maisons, et surtout à ne pas “sur éclairer” un intérieur.

Le duo danois Christian+Jade était également invité au Talk. Choisis parmi les “Rising Talents” (les talents qui incarnent le futur du design) de cette édition de Maison&Objet, Christian Hammer Juhl et Jade Chan ont exposé une partie de leurs sublimes créations dont le bougeoir Reflecting Flame en aluminium (matériau rare chez les designers danois) et les lampes Vessels for Light, qui jouent, une fois de plus, magnifiquement, avec la lumière. Un spectacle que l’on a envie d’avoir chez soi.

Reflecting flame de Christian+Jade

Vessels for light de Christian+Jade

Last but not least, à un moment de la conférence Gesa Hansen revient sur l’importance du choix du matériau pour les scandinaves, du bois notamment, particulièrement vivant, qui se patine avec le temps et qui a, forcément, des imperfections. Elle insiste sur le fait que les scandinaves acceptent le matériau comme il est, n’attendent pas de lui qu’il reste comme “une femme californienne botoxée**”, à l’image des chaises Vitra, qui à une époque, ne bougeaient pas — le cuir était fait de telle sorte qu’il ne changeait pas d’un iota avec les années. Heureusement, dit-elle, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Vieillir en Scandinavie est accepté, c’est même célébré. Interesting !

* Je vous avais parlé du rapport à la lumière de l’architecte d’intérieur anglo-argentine Natalia Sly dans ce numéro. Quand elle se lève le matin, elle allume aussi toujours une bougie. 
** Autre vision du botox pour Emilie Viargues-Metge CEO de Christofle lorsqu’elle explique lors de cette conférence dédiée à Women&Design qu’elle veut redonner de la visibilité à cette maison historique, qui le mérite “J’ai vraiment envie de la mettre sous botox, positivement, pour lui redonner ce mouvement de vie qu’elle mérite, car le botox peut faire beaucoup de bien !”. Je n’ai pas été touchée par toutes les interventions des invitées, mais j’ai apprécié, celles, énergiques, d’Emilie Viargues-Metge qui m’ont fait réfléchir sur l’attitude des femmes en entreprise, sur leur rapport à leur carrière, aux hommes et au management. “Je pense que je dirige comme un homme parce que j’ai confiance en moi.” Je vous laisse faire votre avis :)

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